Interview: “Les problèmes pour lesquels un client peut saisir l’ARSE sont de divers ordres”

Mise en place par les pouvoirs publics l’ARSE, entendez Autorité de Réglementation du Secteur de l’Electricité, est un établissement qui est depuis 2011 investie aussi de la mission de régulation du sous-secteur de l’eau potable et de l’assainissement collectif des eaux usées domestiques. Que fait-elle exactement ? Allons à sa découverte à travers cette interview accordée par Marc D. KOUAKANI-ASSI, Chargé de Communication et des Relations Publiques au sein de cette institution.
- Qu’est-ce que l’Autorité de réglementation du secteur de l’électricité?
Merci pour l’intérêt que vous portez à notre institution. Et vu que nous sommes en début d’année, je me fais le devoir de réitérer au nom du Comité de Direction et de la Direction Générale de l’ARSE, nos meilleurs vœux de santé et de paix profonde à vous-même, à votre organe de presse, à vos lectrices et lecteurs et à l’ensemble de la population togolaise !
Pour revenir à votre question, je dois dire que la mission de l’ARSE se situe à deux niveaux. Nous avons notamment :
Dans le secteur de l’électricité
Les fonctions exercées par l’Autorité de Réglementation pour la mise en œuvre de l’activité de réglementation et de régulation du sous-secteur de l’électricité sont définies aux articles 11 à 14 de la Loi 2000-012 du 18 juillet 2000 relative au secteur de l’électricité. Elles consistent principalement à :
participer à l’évaluation des projets et à la supervision des appels d’offres nationaux et internationaux pour la conclusion de conventions de concession, la construction de nouvelles installations électriques et la modification d’installations électriques existantes ;
émettre un avis sur tout projet de règlement tarifaire, toute action en reconnaissance de droits acquis, les projets de construction d’installations électriques, les questions d’expropriation et de déclaration d’utilité publique.
proposer au ministre chargé de l’énergie des projets de normes et de formules destinées à réguler les activités réglementées, ou relatifs à toute autre question concernant le secteur de l’électricité et plus particulièrement dans le domaine des tarifs pratiqués par les concessionnaires et les exploitants, de la qualité de l’énergie fournie, du cahier des charges et des normes de sécurité ;
procéder aux vérifications et investigations nécessaires, et mettre en œuvre les pouvoirs qu’elle détient aux fins de certifier la conformité des installations électriques aux normes de sécurité et aux normes techniques applicables ainsi que le respect des dispositions de la loi par les concessionnaires et exploitants ;
mettre en œuvre des procédures de conciliation et d’arbitrage pour régler les litiges éventuels entre les intervenants du secteur de l’électricité.
Dans le secteur de l’eau
Par les Lois n°2011-024 du 4 juillet 2011 et n°2010-006 du 18 juin 2010 portant organisation des services publics de l’eau potable et de l’assainissement collectif des eaux usées domestiques, l’ARSE reçoit principalement pour mission dans le secteur de l’eau potable et de l’assainissement collectif de :
mettre en œuvre la réglementation et la régulation du sous-secteur conformément à la politique d’organisation du sous-secteur ;
suivre et d’exercer, a posteriori et sur la base de rapport des délégataires, les contrôles d’exploitation et des délégataires,
émettre un avis sur les conditions de l’équilibre financier du service public et sur les règlements tarifaires ;
veiller au respect des droits des populations à l’accès à l’eau potable et à l’assainissement collectif ;
procéder à la résolution des conflits entre acteurs du secteur de l’eau potable et de l’assainissement collectif.
Outre ces principales missions définies par l’article 17 de la Loi n°2010-006 du 18 juin 2010 portant organisation des services publics de l’eau potable et de l’assainissement collectif des eaux usées domestiques, les articles 18 à 23 de ladite Loi, confèrent des pouvoirs à l’ARSE pour la mise en œuvre de la régulation du sous-secteur. Il s’agit notamment :
du pouvoir de contrôles qui portent essentiellement sur les résultats obtenus par les délégataires et éventuellement sur les moyens mis en œuvre par ceux-ci pour les atteindre ainsi que sur le respect des normes techniques relatives aux installations d’approvisionnement en eau potable et d’assainissement collectif des eaux usées expressément définies par la réglementation et par les contrats de délégation de gestion en vigueur.
du pouvoir de sanctions à l’encontre de l’opérateur qui fournit un service d’eau potable et d’assainissement collectif qui ne se conforme pas, dans un délai déterminé, à la mise en demeure qu’elle lui a adressé ;
du pouvoir d’ordonner des mesures conservatoires et provisoires appropriées, en cas d’atteinte grave et flagrante aux règles régissant le sous-secteur de l’eau potable et d’assainissement collectif et de saisir le procureur de la République en cas d’infraction pénale ;
du pouvoir de diligenter suivant ses procédures, une conciliation entre opérateurs et utilisateurs si elle est saisie d’une demande en conciliation ;
du pouvoir d’arbitrer suivant ses procédures, des litiges entre opérateurs si elle est saisie d’une demande d’arbitrage.
2. Quels sont les types d’énergie dont l’ARSE assure la réglementation?
Essentiellement l’énergie électrique produite à partir de toute source (fossile ou renouvelable). Précisons que les textes actuels n’ont pas fait de spécificité pour une quelconque source d’énergie, notamment les renouvelables. Compte tenu des engagements du pays en matière de production de protection de l’environnement, nous avons déclenché depuis quelques mois un processus avec l’appui de l’ECREE, une institution spécialisée de la CEDEAO en matière d’énergie renouvelables et d’efficacité énergétique, en vue de doter le Togo d’une loi pour la promotion de la production d’énergie électrique à partir des sources renouvelables.
3. Est-ce à dire que c’est l’ARSE qui fixe les prix de vente de ces énergies? Quel est au juste le rôle de l’ARSE?
Non, l’ARSE ne fixe pas le prix de l’électricité. Cet acte relève des prérogatives du Gouvernement. Le système est tel que la CEET propose un arrêté tarifaire et l’ARSE y donne son avis professionnel.
En un mot, la CEET soumet un projet de tarifs au Gouvernement ; ce dernier le soumet à l’ARSE pour avis professionnel. Et au bout de la chaine, le Gouvernement prend une décision en tenant compte ou non de l’avis de l’ARSE. Toutefois, dans le cadre de sa mission de proposer des normes au Gouvernement, il peut arriver que l’ARSE prenne l’initiative de proposer des normes en matière tarifaire. Pour l’heure, ce cas ne s’est pas encore posé dans la pratique.
4. Prenant le secteur de l’électricité, pour quel type de problème les abonnés peuvent-ils vous approcher?
Les préoccupations pour lesquelles un client ou groupe de clients regroupés en collectif ou association de consommateurs peut saisir l’ARSE sont de divers ordres. Il peut s’agir de :
La contestation du montant d’une facture de consommation ;
La contestation des pénalités de rappel de consommation ;
L’application erronée des arrêtés tarifaires ;
La qualité de la fourniture de l’énergie électrique ;
Les dommages électriques ;
La défectuosité des équipements de mesure de l’énergie électrique ;
Le retard dans l’établissement d’un devis de branchement ou dans la réalisation d’un devis ;
Le non règlement des droits de suite des réseaux financés par les tiers ;
5. Arrivez-vous à les satisfaire?
En général oui. Maintenant vous savez bien que la satisfaction suppose aussi le délai de résolution du problème. Dans ce sens, je dirai que parfois, au vu de l’importance des travaux que nécessitent certaines plaintes, la CEET met un peu de temps pour corriger le dysfonctionnement. Ce qui n’est pas toujours compris comme tel par le client qui s’attend à une solution rapide.
6. L’ARSE est en quelque sorte pour la CEET, ce qu’est la HAAC pour les médias?
Attention, pas pour la CEET, mais pour le secteur de l’électricité et depuis 2011 pour le secteur de l’eau potable aussi. L’accent est souvent mis sur la CEET dans les communications tout simplement parce que c’est elle qui assure le service public de distribution de l’énergie électrique à la population.
7. La revente de l’électricité entre les abonnés. Vous intervenez aussi dans les problèmes émanant de cette pratique?
Non, nous n’intervenons pas dans ce problème. Et je dois vous dire qu’en principe, la revente de l’électricité n’est pas autorisée, elle est illégale au vu la Loi n°2000-012 du 18 juillet 2000 relative au secteur de l’électricité et aux dispositions pertinentes de l’Arrêté n°007/MME/ARSE/2012 du 08 février 2012 portant approbation du Règlement Technique de Distribution de l’énergie électrique au Togo (RTD).
8. Eclairage public…
Oui, l’ARSE intervient dans la réglementation et la régulation des activités liées à l’éclairage public au Togo. Elle a de ce fait entamé un processus qui, nous l’espérons va aboutir dans les semaines à venir à la mise en place d’un règlement pour la gestion de l’éclairage public au Togo.
9. Qualité et coût de l’électricité au Togo….
La qualité et le coût de l’électricité font partie des préoccupations constantes des pouvoirs publics et particulièrement des acteurs du secteur de l’électricité, notamment les dirigeants de l’ARSE. Et nous y travaillons quotidiennement ; d’où les contrôles que nous menons régulièrement à la CEET, pour nous assurer de l’amélioration de la qualité du service et des études relatives au coût de production qui sont menées en vue de faire des recommandations aux décideurs.
10. Production et distribution du courant. Qui peut le faire? Pourquoi un seul distributeur (la CEET) ?
Qui peut le faire ? Pour faire simple, je vous renvoie à ce que dit la loi n°2000-012 relative au secteur de l’électricité, en son article 3:
Paragraphe 1 : « Les activités de transport et de distribution de l’énergie électrique sur l’ensemble du territoire de la République Togolaise, y compris son importation et son exportation, constituent un service public national placé sous la responsabilité exclusive de l’Etat » ;
Paragraphe 3 : « L’exploitation des activités visées au paragraphe 1 ci-dessus peut être confiée par l’Etat à une ou plusieurs personnes publiques ou privées, au moyen, notamment de la conclusion d’une ou plusieurs convention de concession. »
Pourquoi un seul distributeur ? Pour le moment la CEET est la seule société à laquelle l’Etat a confié la mission du service public de distribution de l’énergie électrique au Togo. En fonction des évolutions, le pays peut être segmenté en termes de zones de distribution. L’Etat pourra alors confier à deux ou plusieurs opérateurs la mission de distribution de l’énergie électrique dans chacune des zones ainsi créées, comme c’est le cas au Ghana et dans d’autres pays du monde.
11. Secteur eau potable
Comme je l’ai déjà rappelé plus haut, depuis 2011, la mission de régulation des services publics de l’eau potable et de l’assainissement collectif des eaux usées domestiques au Togo est confiée aussi à l’ARSE par le biais de la loi n°2011-024 du 04 juillet 2011 et n°2010-006 du 18 juin 2010 portant organisation des services publics de l’eau potable et de l’assainissement collectif des eaux usées domestique au Togo.
Ce faisant, un consultant est recruté et ensemble avec les autres structures de l’ARSE, notamment la Direction Technique et le Service Juridique, des activités sont réalisées pour permettre une régulation effective de ce sous-secteur. Bientôt, l’ARSE se dotera d’un service qui aura essentiellement pour domaine d’intervention ce secteur.
Interview accordée au journal SIKA’A et diffusée dans son édition du 27 décembre 2016