Régulation de l’énergie électrique : Les régulateurs francophones échangent sur les bonnes pratiques à Libreville

Une délégation de l’Autorité de Réglementation du Secteur de l’Electricité (ARSE), composée de messieurs Jean-Marie AGBOKOU, Luc Mania KELOUWANI et Patrick AGBETO, respectivement Directeur technique, Chef service juridique et Analyste financier a pris part du 08 au 10 juillet 2025 à Libreville au Gabon, au XVIème atelier du réseau des régulateurs francophones de l’énergie (Regulae.fr). Placé sous le thème : « Concrétiser la transition énergétique : Cadres de régulation et retours d’expérience de la communauté RegulaE.Fr », l’atelier a été l’occasion pour les participants venus d’Afrique, de l’Europe, de l’Asie Pacifique et des Amériques d’échanger sur les outils juridiques et le rôle du régulateur dans la structuration des projets énergétiques ; la régulation des mini-réseaux et de l’autoproduction ; le déploiement et la prise en compte des compteurs intelligents dans les tarifs de vente de l’électricité ; etc.
- Autoproduction de l’énergie électrique : le Togo présente son modèle
Exposant sur la régulation de l’autoproduction de l’énergie électrique, Monsieur Jean-Marie Koffi AGBOKOU, a dans un premier temps rappelé que le l’autoproduction de l’électricité est une activité régulée au Togo. Se référant au code Bénino-togolais de l’électricité, à la loi 2000-012 du 18 juillet 2000 relative au secteur de l’électricité et à la loi 2018-08 du 10 août 2018 portant promotion de la production de l’électricité à base des sources d’énergies renouvelables, Monsieur AGBOKOU a indiqué que l’autoproduction est couverte par trois (03) régimes juridiques que sont le régime de la liberté, celui de la déclaration et le régime de l’autorisation.
Relèvent du régime de la liberté, les unités thermiques de puissance inférieure à 50kVA ou celles de sources renouvelables de puissance inférieure à 32kWc.
Le régime de la déclaration concerne les unités thermiques de puissance comprise entre 50 kVA et 500 kVA d’une part et d’autre part les unités de sources renouvelables de puissance supérieure à 32kWc et inférieure à 100kWc.
Les installations thermiques de puissance supérieure à 500 kVA et celles de sources renouvelables de puissance supérieure ou égale à 100 kWc relèvent du régime de l’autorisation.
Avant leur installation, les unités relevant du régime de l’autorisation sont assujetties à l’obtention d’une autorisation d’installation. Elles sont soumises à l’obtention d’une autorisation d’exploitation avant leur mise en service. Ces différents titres sont délivrés par l’organe de régulation. Régulièrement, l’organe de régulation procède au contrôle de la qualité des installations autorisées en vue de s’assurer de leur bonne exploitation. Ces contrôles sont assortis de recommandations dont la mise en œuvre fait l’objet de suivi.
- Le Gabon renforce son cadre énergétique
Le cadre énergétique du Gabon a fait l’objet d’une présentation. Ainsi, abordant la vision énergétique du pays hôte des travaux du XVIème atelier de Regulae.fr, Rodrigue Mankassa, Directeur Général Adjoint de l’Energie de ce pays a présenté les réformes en cours dans le secteur. Il s’agit de l’amélioration de la Gouvernance du secteur, du développement d’une offre énergétique abondante, compétitive et durable et du développement d’un réseau national de transport en vue d’interconnecter les réseaux provinciaux du pays. D’après l’orateur, ces réformes visent à accroitre l’indépendance énergétique du Gabon à un coût abordable et à assurer l’équilibre financier du secteur de l’électricité dans ce pays. Emmanuel Berre, Directeur général de l’Agence de régulation des secteurs de l’Eau potable et de l’Energie du Gabon (ARSEEG), a indiqué pour sa part que le régulateur assure non seulement la viabilité des secteurs régulés mais veille aussi à un accès équitable de la population aux services publics de l’électricité et de l’eau potable. D’après lui, « l’économie réalisée par l’Etat suite à l’intervention du régulateur s’élève à plus de 1000 milliards de FCFA sur la durée des concessions ». Ces chiffres, commente-t-il, montre bien l’importance du rôle régulateur dans le secteur de l’électricité gabonais.
- Attractivité des investissements privés : la Banque mondiale dresse le tableau des critères pertinents
Concernant l’attractivité des investissements privés dans les projets énergétiques, Yussuf Uwamahoro, Coordonnateur du Programme Infrastructure pour l’Afrique central de la Banque mondiale, a insisté sur l’évaluation de la bancabilité desdits projets, notamment les critères à respecter. Il s’agit particulièrement de la rentabilité économique et financière, de l’évaluation des risques environnementaux et sociaux d’une part, des risques de gestion et de passation des marchés d’autre part. Cette intervention est complétée par le retour d’expériences de la représentante de ENGIE qui est revenue sur les attentes et le retour sur investissement d’un privé qui souhaiterait investir dans l’énergie. Elle a insisté sur la rentabilité, la solvabilité et la performance des projets énergétiques.
L’assistance a été également outillée sur le cadre d’accompagnement du dynamisme des projets d’innovations solaires à travers les présentations du projet «Scaling Solar» mise en œuvre au Sénégal et l’aventure de la start-up Solar Box au Gabon. Ces présentations sont faites respectivement par le représentant de la Commission de Régulation du Secteur de l’Energie (CRSE) au Sénégal et le représentant de la direction des Energies Nouvelles et Renouvelables au Gabon. Il ressort de ces présentations qu’avec le soutien de la société financière internationale (SFI), le Sénégal a pu se doter de deux unités solaires de respectivement 25 et 35 MW chacune pour des tarifs d’achat fixé à 26,12 et 24,93 Francs CFA chacune. Toutefois, il est mis en évidence quatre défis rencontrés dans la mise en œuvre des projets Scaling Solar au Sénégal. Il s’agit : (a) du manque d’alignement entre les procédures de Scaling Solar et le cadre réglementaire national ; (b) de la complexité des contrats (Les contrats d’achat d’électricité (PPA) issus de Scaling Solar sont juridiquement et techniquement complexes) ; (c) l’Intégration des centrales solaires dans le réseau (la commission de régulation a dû veiller à ce que l’ insertion des productions issues des centrales Scaling solar n’engendre pas d’instabilités ou de coûts cachés pour l’opérateur du réseau de Senelec notamment en lien avec la variabilité de la production solaire en relation avec Senelec ; (d) Coordination institutionnelle difficile du fait de la multiplicité des acteurs, notamment la SFI, l’agence sénégalaise des énergies renouvelables (ANER), l’opérateur historique (la SENELEC), le ministère de l’Énergie, etc.
- La régulation s’enrichie de l’innovation
En abordant les thématiques relatives à l’innovation et à la gestion des bornes électriques, la représentante Commission de régulation de l’énergie (CRE) en France est revenue sur l’accompagnement du régulateur dans le déploiement des compteurs intelligents à travers la définition les standards techniques et des exigences de performances, la répartition équitable des coûts entre opérateurs et consommateurs ; la promotion des modèles tarifaires qui encouragent l’efficacité énergétique, etc. Ces outils protègent l’opérateur contre les fraudes et les difficultés de recouvrement et favorisent une meilleure maitrise de la demande.
- Le cap vert vise 100% de véhicule électrique en 2030 dans l’administration
Par ailleurs, le Directeur exécutif du Centre Régionale des Energies Renouvelables et de l’Efficacité Energétique en Afrique de l’Ouest (ECREEE) est revenu sur l’appui de la CEDEAO au déploiement de bornes de recharge électrique en axant sa présentation sur le cas du Cap Vert. Il a d’entrée, présenté l’aperçu et le plan stratégique 2023-2027 de l’ECREEE en matière d’Energie Durable avant de revenir sur le déploiement de la mobilité électrique au Cap Vert. De faite, ce pays a mis en place une politique et un plan d’action sur la Mobilité Electrique (véhicules électriques) pour porter la part des véhicules électriques dans le parc de l’administration à 100% à l’horizon 2030 et dans le parc automobile national à 100% à l’horizon 2050.
Notons que le Regulae.fr regroupe les organes de régulation des secteurs de l’énergie des pays d’expression française de tous les continents. Il compte à ce jour une trentaine de membres et est présidé actuellement par la RDC, en la personne de Mme Sylvie OLELA ODIMBA, Présidente de l’Agence de Régulation du Secteur de l’Electricité de la RDC.




